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Le communautarisme à l'école, agravé par Vallaud-Belkacem

28 Juin 2016 , Rédigé par Jean-Paul Brighelli, Lydia Guirous, Le Point Publié dans #A l'école

Le communautarisme à l'école, agravé par Vallaud-Belkacem

Ceci est l'interview de Lydia Guirous par Jean-Paul Brighelli, paru dans la revue "Le Point" du 17/06/2016. Elle concerne en particulier l'école. Et les très curieuses mesures prises récemment par notre ministre de l’Éducation Nationale...

Lydia Guirous est l'ex-porte-parole des Républicains, remerciée à cause de son absence de langue de bois. Elle a publié un livre: "#Je suis Marianne".

"L'actualité étant ce qu'elle est depuis ces derniers mois, c'est avec un léger retard que j'ai lu #Je suis Marianne* (Grasset), le dernier livre de Lydia Guirous (après Allah est grand, la République aussi, Jean-Claude Lattès, 2014). Alors, plutôt que de rendre compte de ma lecture (enthousiaste), j'ai préféré interviewer directement l'auteur – qui n'a pas sa langue dans sa poche. Mes questions se sont limitées à ce qui concerne directement l'école. Pour un tour d'horizon de la situation politique, et plus particulièrement des musulmans français, voir ici.

Jean-Paul Brighelli : Vous insistez à plusieurs reprises dans votre livre sur l'abyssal mépris de certains pédagogues – ceux qui dirigent la Rue de Grenelle depuis trente ans – pour le peuple. Pouvez-vous en donner des exemples ? Qu'en a-t-il été pour vous, née en Kabylie, petite fille d'une famille nombreuse déracinée dans le nord de la France par la montée des périls en Algérie, et parlant un français qui n'était pas forcément celui de vos petits camarades ?

Lydia Guirous : La gauche bien-pensante aime se donner bonne conscience en faisant semblant de s'intéresser aux enfants de condition modeste, et particulièrement aux enfants issus de l'immigration. Ils font leur BA, en bons scouts de la pensée unique, mais attention : il ne faut pas croire qu'ils souhaitent que tous les enfants modestes se mélangent avec les autres et que l'école républicaine tire tout le monde vers le haut, riches comme pauvres. Non, ce qu'ils veulent, eux, c'est garder les gens enfermés dans leurs cases : le pauvre, l'ouvrier, l'immigré… Eh oui, si tout le monde se mélangeait, on ne pourrait pas les entendre geindre sur les plateaux télé alors que leurs enfants sont tranquillement enfermés dans les bonnes écoles parisiennes. Alors ils ont trouvé la solution pour concilier leur volonté de se faire du bien et de leurrer le peuple : ils ont nivelé le niveau scolaire vers le bas dans les zones d'éducation difficile. De cette manière, ils ont l'illusion d'avoir œuvré pour le bien commun, alors que, finalement, ils ont créé des bataillons d'élèves de faible niveau qui seront très rapidement largués dans l'enseignement secondaire et supérieur et qui finiront chômeurs, car malheureusement le marché du travail, lui, augmente en permanence ses exigences. C'est cela, le mépris : faire croire au peuple qu'on l'aide, alors que l'on construit une barrière autour de lui et qu'on lui lance avec beaucoup de mépris quelques cacahuètes pour calmer sa colère. À titre personnel, à Roubaix, il a fallu que je me batte et que je travaille seule pour apprendre les grands auteurs, car de nombreux enseignants pensaient que l'étude du rap, du graph et des tags nous parlait plus… Mais ce n'est pas avec cette « culture urbaine » qu'on réussit ses copies de culture générale lors des concours de grandes écoles…

JPB. « C'est justement pour préserver ce qui est neuf et révolutionnaire dans chaque enfant que l'éducation doit être conservatrice. » Un propos auquel j'adhère entièrement. Comment expliquez-vous que son évidence ne saute pas aux yeux de nos modernes pédagogues, qui se veulent (ou se croient) « de gauche » ?

L.G. Tout simplement parce que ces idéologues vieillissants sont les produits du ravage culturel de Mai 68 : « il est interdit d'interdire », « Sous les pavés la plage », « CRS, SS »… vous vous souvenez ? Eh bien, ce sont ces dinosaures, ces apparatchiks gauchistes, qui ont pris le pouvoir et lénifié la pensée et le sens critique pendant plus de quarante ans. Ils ont menti au peuple et à ses enfants en développant des théories absurdes sur l'autonomie des élèves et en n'ayant de cesse de niveler l'école vers le bas. Najat Vallaud-Belkacem est leur digne héritière ! Le pire dans tout cela, c'est que les pédagogues de gauche savent très bien qu'ils ont tort et que leur idéologie est dangereuse. Leur pensée, c'est un dol culturel et idéologique qui n'a pour seule ambition que de garder leur zone de pouvoir, leurs enseignements à la fac et leurs contrats d'édition… Dans le fond, ils savent très bien que ce qu'ils prônent ne marche pas, sinon ils n'y aurait pas autant d'enfants de profs à Sciences Po, à l'Ena et dans les grandes écoles… L'élitisme, ils connaissent – pour leurs enfants !

JPB. « La discrimination positive à l'école n'est rien d'autre qu'un néo-colonialisme déguisé » – bien sûr ! Mais alors, comment faire lorsque certaines populations sont de toute évidence en décalage culturel ? Leur proposer de travailler deux fois plus que les autres ?

L.G. Oui, c'est une évidence. Cela n'a rien de stigmatisant, quand on est moins bon, il faut travailler plus. Cela est vrai pour l'école, le sport, la musique, partout ! C'est comme ça. Quant au décalage culturel dont vous parlez, il y a deux points. Concernant les nouveaux entrants, il faut stopper l'immigration massive et passer à une immigration choisie, avec des populations en accord avec nos besoins économiques et nos valeurs culturelles et politiques. Concernant les immigrés qui sont déjà sur notre territoire, il faut imposer des cours de langue française, d'instruction civique et d'histoire et sanctionner ces derniers par un examen. La réussite à cet examen devrait, selon moi, conditionner l'obtention de la nationalité française et d'un certain nombre d'aides sociales. Cela permettrait une meilleure assimilation et nous retrouverions plus de cohésion nationale.

JPB. Vous retrouvez les formules de Jean Zay, homme de gauche qui préconisait, comme vous, « une école hermétique aux pressions de tout ce qui se présente avec le masque de la sacro-sainte modernité ». Il n'y a donc pas d'école de droite ou d'école de gauche ?

L.G. Non, il n'y a qu'une seule école, l'école de la République, celle dans laquelle votre mérite et votre travail construisent votre avenir, celle dans laquelle vous devenez des citoyens, celle dans laquelle vous devenez des hommes. Malheureusement, ce gouvernement a choisi l'école du nivellement par le bas. Ils mettent l'école au niveau des plus mauvais élèves et y font entrer « tout ce qui se présente sous le masque de la modernité » en supprimant les notes, le redoublement, les classements… Ils remplacent les livres par des tablettes, l'apprentissage de l'écriture par des « clics », les exposés se font par copier-coller sur Wikipédia sans un effort réel de compréhension… Et la laïcité est bafouée en laissant des femmes voilées accompagner les enfants lors des sorties scolaires. Cette école-là est une école à deux vitesses, qui s'apparente plus à une garderie qu'à un sanctuaire du savoir. Je souhaite une école de l'instruction, de la rigueur et de la discipline. C'est la seule manière de permettre à tous les élèves – quelle que soit leur condition – de réussir, de construire une génération de citoyens à l'esprit critique et éclairé, c'est la seule façon de rendre possible la méritocratie républicaine.

JPB. « La réforme du collège détruit l'ambition d'excellence pour tous et installe la médiocrité pour tous. » Comment expliquez-vous que Najat Vallaud-Belkacem, née dans le Maghreb comme vous, petite fille d'une famille nombreuse comme vous, avec des parents ouvriers, n'ait pas pensé à revivifier l'école primaire et le collège qui lui ont permis de devenir ce qu'elle est – et même qu'au contraire elle ait à cœur de détruire ce qu'il en reste en mettant en place, comme vous le dites fort bien, « une école à deux vitesses, celle de l'instruction face à celle de la garderie » ? Par idéologie, par obéissance aux règles fixées par l'Europe – ou quoi ?

L.G. Le problème, c'est que bien des gens oublient de regarder derrière eux et de dire merci. C'est ce qui doit se passer pour Najat Vallaud-Belkacem, qui a oublié que c'est l'école de la République qui a fait d'elle ce qu'elle est aujourd'hui. Elle n'aime pas l'excellence ? Alors pourquoi est-elle allée sur les bancs de Sciences Po ? Elle aime la mixité sociale et ne supporte pas les élites… Et pourtant, son mari est énarque et secrétaire général adjoint de l'Élysée. Tout cela est factice, le positionnement idéologique de NVB comme de toute la gauche repose sur un mensonge, mais, rassurez-vous, leurs enfants, eux, sont dans les filières d'excellence ! Finalement, avec la gauche, c'est « faites ce que je dis, mais pas ce que je fais ». Quel manque de considération pour les Français ! Quel cynisme, quel mépris !

JPB. « Une famille dont les enfants ont un fort taux d'absentéisme et causent des troubles au sein de l'école doit voir ses allocations diminuées ou complètement supprimées » – fort bien. Ne pourrait-on pas également repenser le système des bourses en les attribuant plus systématiquement au mérite, au lieu de les indexer systématiquement sur l'état des ressources ?

L.G. C'est une évidence, c'est le mérite qui doit primer. Il est vrai que, chaque année, certains bénéficient de bourses dans le supérieur sans suivre les cours ensuite. Avoir une bourse alors que l'on ne veut pas travailler réellement est une insulte pour tous les étudiants qui, sans bourse, vivent souvent dans 6 ou 7 mètres carrés avec des douches et des toilettes communes sur le palier.

JPB. « La religion se vit pour soi, chez soi, et ne doit pas se porter comme un étendard en place publique. » Vous exprimez votre désir de voir étendue aux universités la loi de 2004. Mais êtes-vous favorable à une interdiction totale du voile dans les rues ? Et que pensez-vous de la décision de Mme Vallaud-Belkacem d'autoriser des mères voilées à encadrer des sorties scolaires ?

L.G. Je souhaite que le voile soit interdit à l'université, mais également dans les entreprises. Il est un instrument de prosélytisme religieux employé par les salafistes et les Frères musulmans pour construire une société où la religion s'impose dans l'espace public et défie la République. L'idée, c'est de dire nous sommes musulmanes avant d'être françaises : cela est incompatible avec le sens même de la République. Les femmes voilées sont les idiotes utiles du salafisme, elles ne se rendent même pas compte de leur degré de soumission aux hommes et à leur « communauté ». Celles qui portent le jilbeb ou le niqab sont les instruments de propagande d'une idéologie mortifère surtout chez les jeunes. Si c'est leur choix, elles doivent être cohérentes et aller vivre dans un pays où cela ne dérange personne et ne heurte pas les valeurs et le mode de vie. Il y a plein de beaux pays musulmans où leur pratique rigoriste et leur mode vestimentaire ne dérangeront pas… Mais pas en France.

Quant à la décision de NVB d'autoriser le voile aux mères accompagnatrices en revenant sur la circulaire Chatel, je la condamne fermement depuis plusieurs années. C'est une honte, un renoncement, une lâcheté, un recul grave qui consiste à laisser s'installer l'idée que le fait religieux a toute sa place à l'école publique de la République française. Je ne peux pas l'accepter. Et puis c'est aussi une façon d'habituer les enfants à voir des voiles sur la tête des femmes et des signes ostentatoires à l'école… Ensuite, comment pourront-ils comprendre la loi de 2004 ? C'est une façon sournoise d'attaquer encore une fois la laïcité à l'école. Par ailleurs, cela installe l'idée que c'est l'école qui doit s'adapter aux minorités. Je combats cette idée. L'école est une institution pilier de notre République, il faut la renforcer. Ce n'est pas à elle de s'adapter aux élèves, aux parents, aux revendications religieuses, aux minorités.

JPB. Comme vous le notez, ce n'est plus seulement la viande de porc qui est rejetée par les petits musulmans à l'école, mais toute viande, à partir du moment où elle n'est pas halal – si bien que des centaines de kilos de viande sont jetés à la poubelle chaque jour. J'ai vu moi-même des élèves refuser des légumes qui étaient susceptibles d'avoir touché une viande non halal. Que proposer alors aux enfants dans les cantines ?

L.G. Vous savez, c'est un faux problème, le porc est servi moins d'une fois par semaine dans les cantines et, à chaque fois, on peut prendre en parallèle des légumes et des féculents, ainsi que des entrées, des desserts ou du fromage avec du pain. Je pense que le fait de ne pas manger de viande à un repas n'est pas un drame. D'ailleurs, aujourd'hui, ils ne mangent même pas le poulet, le bœuf, l'agneau, car ils ne sont pas « halal »… À mon sens, c'est un signe de radicalisation des esprits, c'est la pression des parents qui amène à ces comportements. Beaucoup de personnes d'origine maghrébine m'ont rapporté les pressions subies par leurs enfants. Des pressions venant d'autres camarades et même du personnel des cantines scolaires pour exiger qu'ils choisissent le menu de substitution. Cela s'appelle la pression communautaire, et elle se fait aujourd'hui au sein de l'école.

Pour moi, les menus de substitution à l'école, c'est comme le voile : c'est encore de la mauvaise foi pour remettre du religieux à l'école publique et faire céder la République en se victimisant et en jouant sur la culpabilité. Ces gens doivent savoir que l'école publique et laïque ne cédera pas à leur chantage, comme elle n'a pas cédé lorsque des filles voilées hurlaient qu'on les privait de l'accès au savoir en leur interdisant le voile en 2004. Finalement, elles ont retiré le voile dans le secondaire et sont allées à l'école quand même. Force doit rester à la loi. Ne nous laissons pas berner."

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